Vision sensible et personnelle du candidat sur le projet, les lieux concernés et les enjeux que recouvre la commande d’un mobilier liturgique, particulièrement pour la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Le mobilier de Notre-Dame est une acmé qui fait sourdre en moi le même vertige passionné que celui des tailleurs de pierre de Maurice de Sully, il y a dix siècles. Il doit comprendre à mon sens trois dimensions fondatrices : une inventivité où le passé se transfigure dans le langage du présent, porteuse d’un message universel, qui suscite l’émerveillement de l’Espérance.
Une inventivité où le passé se transfigure dans le langage du présent
L’enjeu est d’embrasser la tradition liturgique, de saisir l’esprit du lieu et de le couronner par une expression technique et esthétique du XXIe siècle. La cathédrale est l’apogée d’un art savant, exécuté par des générations d’« œuvriers » de génie. Le nouveau mobilier doit être lui aussi un apogée du savoir-faire de notre siècle et une page du palimpseste de la cathédrale.
Porteuse d’un message universel
La nuit de l’incendie, l’effondrement de la flèche a transcendé les différences de continents, de religions, de convictions. Notre-Dame est un chef-d’œuvre, un bien à la portée universelle. Un lieu de beauté et de paix. Le futur mobilier, doit embrasser et incarner cette largeur d’horizon, en étant compréhensible de manière universelle.
Qui suscite l’émerveillement de l’Espérance
La charpente et la flèche reconstruites à l’identique, le mobilier sera l’élément nouveau qui dira la renaissance, la résurrection. Il doit émerveiller par son apparence et dire l’Espérance qui est au cœur de la foi. Donner l’image du Christianisme du XXIe siècle, bâtisseur, lumineux, pour qui Dieu est amour.
Mise en mots par le candidat de sa démarche artistique et des grands principes qui ont régi jusqu’ à présent sa création
J’ai dédié les quinze dernières années de ma vie à la création liturgique. Mon travail de réaménagement liturgique est musical, symphonique. Une église est un orchestre, il s’agit d’accorder ses différents « pupitres » que sont ses volumes, son époque et son style propre, son mobilier existant, sa dédicace, mais aussi son orientation pour la lumière des vitraux. La stratification des siècles auquel on va adjoindre une création contemporaine. Il s’agit de s’imprégner d’un lieu pour créer l’œuvre qui va l’unifier et la magnifier. Il m’est arrivé de travailler dans des églises du XVe siècle ou dans des églises que j’ai vues sortir de terre. Je forge ma création en SERVANT le lieu dans son identité propre.
La nature de ce service se joue sur deux axes. Il faut servir verticalement le divin en retranscrivant de manière accessible les Mystères sacramentaux. Et s’adresser sur un axe horizontal à toute la largeur de l’éventail des fidèles et visiteurs qui passent dans les églises. L’aménagement liturgique revient à unifier ces deux axes.
Le mobilier est un des vecteurs de la rencontre avec Dieu. L’autel est le lieu de la transsubstantiation. Le tabernacle est la demeure de Dieu sur terre. L’ambon est la montagne où la Parole est proclamée à travers les siècles. Le baptistère est le lieu de la renaissance par l’eau baptismale. La cathèdre est le siège de celui qui célèbre in persona Christi.
Ce sont ces dimensions qu’il faut donner à voir. Aussi bien aux fidèles qui doivent être nourris dans leur foi mais aussi et peut-être d’avantage encore, les simples visiteurs, curieux et touristes. En parvenant à émouvoir sans mots, à saisir l’âme par-delà les convictions et les connaissances, en manifestant par la beauté esthétique quelque chose de Dieu.
Liens que le candidat établit entre la démarche de création qu’il a pu développer par le passé et la commande de mobilier liturgique pour la cathédrale.